Carnet de Bord
Raid Grand Sud Tunisie
21 février au 2 mars 1998
Texte & Photos: Gregory
Darmon
Ceci est le journal que j'ai tenu lors d'un raid organisé par
Amonzevo dans le Sud Tunisien. Je n'avais auparavant jamais roulé
dans le sable, mais ça fait maintenant 3 ans que je roule en enduro
et plus j'en fais, plus ça me plait! En cliquant sur les photos,
vous obtiendrez les grands formats (max 50k).
Le parcours total faisait près de
1'800km y compris les 500 bornes que constituent les 2 étapes de
liason bitume Tunis-Sbeitla et Meknassy-Tunis.
Le budget total était d'environ
FF 8'000.- sans compter la préparation
de ma XR 400.
[Samedi 21; Marseille - Tunis]
Rencontre à 8h30 avec la majorité du groupe à
l’hôtel Campanile de St-Antoine, Marseille, France
Il y a pour les 4x4: Dominique d’Amonzevo avec son Land-Rover C130 d'assistance,
les frères Ollier (François et Marc) et leur Land-Cruser,
Dominique et Yvon dans leur Patrol et les Italiens sur Land-Rover (chassis
court)
Chez les motards, se joignent à Gérard, l'ouvreur, et
sa katoche 620, Pierre sur kawa 250, Jean-Michel au guidon d'une DR 350,
Hassen et sa XR 400, Daniel avec une Honda 600XL, Denis pilote une ténéré,
David et sa Yam 600XT et moi sur une XR400
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Le Napoléon
A 12h30 on quitte finalement le port de Marseille. Repas de midi et du
soir à bord. Nous faisons connaissance, puis Dominique nous présente
le raid et nous faits les recommandations suivante:
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Toujours avoir de l'eau sur soi: on dessèche vite dans le désert.
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Par jeux, les gamins dans les villages peuvent jeter des cailloux pour
voir s’ils sont bon à la visette. En ralentissant et en les regardant
dans les yeux, en général, ils ne tirent pas.
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La où il y à un hôtel, il y à une station d'essence
dans les parages. Ne pas oublier de faire le plein.
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Dans les dunes, on peux se perdre à 100m. Garder le contact visuel
et au besoin monter sur une crête pour avoir une meilleur portée
visuelle.
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Le sable est plus porteur quand il est frais, le matin. Il y a formation
d'une croûte pendant la nuit.
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Théorie de Gérard: si les vaguelettes sur les dunes sont
parallèles aux courbes de niveau, le sable est dur. Si elles sont
perpendiculaires, le sable est mou.
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Dans les villes, possible contrôle de Police: mettre la ceinture
et rouler doucement. Bakchichs possible, à négocier dans
la bonne humeur.
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Les radios (CB) sont interdites en Tunisie. Si vous en avez quand même,
planquez les.
[Dimanche 22; Tunis - Sbeitla; 250km; 15L]
Débarquement à Tunis vers11h00. Trois coups de tampons
+tard (à 1 heure le coup d'estampille) il est 14h00. On fait le
plein à la première station à la sortie de la zone
portuaire puis on va bouffer dans un bistrot du coin en attendant Denis
qui nous rejoint par avion. Départ de Tunis vers16h00 pour Sbeitla
à plus de 250 bornes de bitume. C'est chiant et en plus à
partir se 18h00 il fait nuit: j 'peux même pas admirer le paysage.
En arrivant à Sbeitla, on fait le plein, puis on va à hôtel.
Bouffe, préparation du road-book pour le lendemain puis dodo.
[Lundi 23; Sbeitla - Tozeur; 300km; 17L]
Départ de Sbeitla vers 8h30. Y’a un vent à décorner
un mouton et ça caille. Pendant la nuit, je me suis fait chourrer
le compteur à vélo (que j’avais installé à
la place du compteur Honda d’origine) bien que les bécanes aient
été sous clefs, dans l’hôtel. Ca commence bien...
Gérard, l’ouvreur moto, nous dit qu’on va rouler en “tiroir”,
c’est à dire qu’à chaque fois qu’il y a un doute possible
quant à la direction à prendre, le motard qui suit directement
l’ouvreur attend que tout les autres motos soient passés pour repartir.
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Gerard à donf
Je roule au road-book. Plus précisément, vu que je suis un
novice en la matière, j’ai un road-book que j’essaye de dérouler
en suivant Gérard, ce qui ne m’empêche pas de faire 15 bornes
dans la mauvaise direction car dans un village Gérard n’a pas put
laisser un “tiroir” pour cause d’attroupement instantané.
Dans les villages les gamins nous saluent (parfois avec des pierres)
et faut surtout pas s’arrêter sinon c’est l’agglutinage immédiat,
dans quel cas faut bien surveiller tout ce qui peut ce chaparder.
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Chbika
La première partie de la journée se fait sur de la piste
au milieu des cactus et des villages. On passe un barrage en construction
(depuis plus de 3 ans, nous dit-on) puis on s’arrête à Gafsa
pour croquer un morceau dans un établissement local. La seconde
partie de la journée, c’est de la piste hyper roulante, ça
ouvre un max. Après quelques heures nous arrivons à Chbika,
un oasis avec des ruines. Au fond une jolie petite cascade et en grimpant
sur les reliefs, une magnifique vue sur le Chott.
On revient un poil en arrière pour repartir en direction de Tozeur
en roulant parallèle au bitume, sur les franges du Chott. Faut virer
entre les herbes à chameau et le sol est légèrement
meuble. Y’a de quoi s’amuser!
[Mardi 24; Tozeur - Douz; 220km; 16.5L]
Départ de l’hôtel par une piste recouverte d’une fine
couche de sable: ça fait roulement à bille et à froid,
le matin, j’n’aime pas et j’me traîne. A Nafta on fait les emplettes
pour le repas de midi puis on repart pour attaquer le contour du Chott-el-Jerid.
Petite session de surf sur des dunettes, puis rapidement on touche une
piste toute droite sur des dizaines de bornes; ça ouvre et ça
secoue a tel point que j’éclate le petit sac que j’avais arrimé
sur le garde-boue arrière. Pendant que je ramasse le contenu éparpillé
de mon sac, un berger apparaît de nul part...!
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En contournant le Chott
Après une pause, on paume Denis. Je retourne en arrière (toute
les excuse sont bonnes pour rouler plus) pour le chercher. Je le retrouve
qui roule avec les 4x4, puis je repars à la poursuite du reste de
l’équipe. Les distance sont trompeuse; j’ai l’impression que le
regard porte à plusieurs dizaines de kilomètres, mais en
fait, quand j’ ai 5 km de visi, c’est un max. La piste, bien que droite
est pleine de pierre et y’à des saut à intervalles réguliers.
Le seul problème, c’est que l’on ne vois pas ce qu’il y à
derrière les sauts (trou, pierrier, etc...)
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Dans le bac à sable
A midi on pique-nique sur une butte, puis on repart sur le même type
de piste: tout droit à donf ! A quelques kilomètres de Douz,
première (courte) séance de dunes: c’est vachement fun! ça
promet pour les prochains jours...
L’hôtel est moyen et la bouffe n’est pas terrible: trop européenne.
Le “parc” à moto est bourré de katoche: une équipe
de KTM Allemagne est venu s’entraîner dans la région.
[Mercredi 25; Douz - Bivouac; 110km; 10L]
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Le café de la porte du désert
On se lève une demi-heure plus tôt que les jours précédant
(vers 6h30) afin de partir vers 8h00. Aujourd’hui est le jour où
l’on va faire notre baptême des dunes. Ca commence par 80km de piste
a donf. A un croisement de piste, un café! Après un p’tit
remontant, on prend à droite. La piste devient traître car
par endroit y’a des congères de sable souvent dur (et on en profite
pour s’envoyer en l’air) mais parfois mou: ça surprend.
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La porte du désert
Après plusieurs kilomètres de ce type de piste, on arrive
devant une “porte” posée au milieu de nul part. A quelques km derrière
la porte les congères de sable se transforme en petite dunes (max
1m50 de haut). On pose le bivouac là et déchargeons le Land
c130 d’assistance. Amonzevo à engager les services d’une agence
locale pour préparer le repas du soir et garder le bivouac, ils
nous ont rejoint avec leur Land-Cruiser rutilant.
Après le casse-croûte de midi, nous partons en direction
de la montagne noire, plein sud. Au fur et à mesure que l’on avance,
les dunes augmentent de taille , ainsi que la difficulté à
les passer, mais on s’y fait vite. On fini par passer un cordon de dunes
qui doit bien faire une centaine de mètres d’altitude, sur quelques
centaine de mètre de large. Un fois que j’ai compris le truc, le
sable, c’est le pied:
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Du sable, encore du sable
Photo: G. Bussod
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S’arrêter au sommet des dunes (en fait 50 cm après le sommet
pour mettre la moto sur la pente descendante), car on ne voit pas ce qu’il
y à de l’autre coté.
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Ne pas couper les gaz trop tôt car le sable freine vite et même
à 1 mètre du sommet, ça fait long à pousser
la moto.
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En cas d’ensablement, ne pas insister, pencher la moto sur un coté
et la dégager.
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Dans les grande dunes, si le moteur s’essouffle avant d’arriver en haut,
ne pas hésiter a prendre un grand virage afin de redescendre et
de prendre de la vitesse pour mieux remonter (ça c’est ce qu’il
y a de plus fun, j’ai l’impression de surfer).
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Selon la configuration de la dune, arriver en biais sur le sommet, s’il
y a une sévère dèrupte de l’autre côté,
ca permet de facilement corriger la trajectoire sans s’arrêter.
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Le Sud Tunisien
Les 4x4 font la même chose, mais comme ils ont moins de marge de
manoeuvre, en cas d’ensablement c’est pas 120kg qu’il faut dégager
mais 2 tonnes! Derrière le cordon, c’est plat avec de l’herbe a
chameau et parfois des congères de sable sur dix bornes jusqu’à
la montagne noire, qui n’est plus noire une fois que l’on à le nez
dessus. Derrière celle-ci un bac à sable géant: on
passe le reste de l’après-midi a s’amuser dedans, mais il faut bientôt
penser à retourner au bivouac.
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Le Bivouac
Au retour, la 600XL de Daniel rend l’âme: elle est chargée
à l’arrière du C130 et ramenée au bivouac. Le cordon
de dunes se passe maintenant avec aisance.
Au bivouac, les mécanos de service se penchent sur la moto de
Daniel, pendant que le reste de l’équipe tchatche avec les locaux
qui nous prépare le festin du soir.
[Jeudi 26; Bivouac Ksar Ghilane; 66km; 7L]
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Une p'tite pause.
Le verdict des mécanos est que le CDI à sûrement claquer.
La 600XL est embarquée à bord du Land-Rover direction Douz
pendant que les autres partent en direction de Ksar Ghilane. Denis et Daniel
ont échangé leurs places, donc Denis accompagne la moto à
Douz. Comme les 4x4 n’ont plus d’ouvreur, nous roulons groupé: ça
traîne. Le matin on fait encore de la dune et c’est le pied mais
l’après-midi on retrouve une piste toute droite, donc à fond...et
on lâche les 4x4. Visite des ruines du fort de Ksar Ghilane qui surplombe
la palmeraie, puis il y à un dernier cordon de dune à passer
avant d’arriver à la palmeraie. Ca sera la dernière fois
que l’on fera du sable lors de ce raid.
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Les ruines du fort de Ksar Ghilane
A Ksar Ghilane, il n’y à pas (encore) de construction en dur, mais
que des tentes permanentes. On dormira dans un camping avec tente déjà
posée et lit de camp. Y’a une source d’eau chaude qui dégage
pas mal d’humidité. Le soir on à le droit à des spagouze
et de l’escalope de dinde, bref pas très couleur locale. On retrouve
l’équipe de KTM. Alors que l’on ne l’attendais plus, le C130 arrive
en fin de soirée précédé de la 600XL: A Douz,
le mécano-sorcier auquel ils ont confier la moto à disparu
pendant plus d’une heure avec. A son retour la moto fonctionnait...on se
demande si le CDI à bien été changé et si oui,
d’où provient-il ?
[Vendredi 27; Ksar Ghilane - Tataouine; 177km 10L]
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Ksar Ghilane
On se lève dans le brouillard tellement il y à de l’humidité
retenue par le sable. Départ tardif sur des pistes qui avionnent:
30 bornes sur la piste (ou plutôt une auto-piste tellement elle est
large) du pipeline. En début d’après-midi on prend un oued
sur quelques dizaines de bornes. Comme c’est remplis de caillasse, ça
trialise une peu. On rate une case sur le road-book et on fait un détour
involontaire qui nous fait passer devant plusieures tentes berbère.
Finalement on rejoint une piste principale et on se retrouve sur le road-book.
Dans une ligne droite, je tape un caillou et crève de l’avant: changement
de chambre à air en plein désert. J’en ai pris une de rechange,
mais elle est dans le 4x4 d’assistance qui se trouve...probablement devant
puisqu’on à fait un détour imprévu! Heureusement que
Gérard à tout sur lui. Peu après on touche du bitume
puis on arrive à Tataouine, dans un hôtel de luxe...la douche
n’est pas de refus.
[Samedi 28; Tataouine - Kairouan; Terrain: 320km; Bitume: 150km]
Etape marathon y’a plus de 450 bornes à faire aujourd’hui. On
se lève à des heures pas autorisées. On passe d’abord
par Chenini, un village troglodyte. Puis les paysages défilent:
tantôt de la piste roulante, parfois un petit col sympa qui tortille
bien, ou alors un soupçon de bitume. Avant d’arriver à Tataouine,
les paysages étaient désertiques. Entre Tataouine et Kairouan
, on traverse de nombreux villages et plus on remonte vers le nord plus
il y a des cultures. A midi on se fait un resto à Matmata (on a
fait que 160 bornes).
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Un p'tit col sympa
Photo: G. Bussod
On repart de plus belle pour finir la partie terrain par un petit col vachement
sympathique et caillouteux. Il est passé 18h00 quand en prend la
route pour Kairouan. On va se mettre de nuit vu qu’il y a près de
150 km à se faire. A 100 bornes de Kairouan, la Yam XT profite du
bitume et de la nuit pour serrer! Manque de chance le C130 passe devant
David sans le voir car il dépassait un camion à ce moment.
La Yam sera rapatriée quelques heures plus tard sur Kairouan a bord
d’une Peugot 403 pick-up, puis a Tunis à bord du C130.
[Dimanche 1; Kairouan - Tunis;]
Rien d’excitant aujourd’hui et même pas le temps d’aller visiter
le souk car il faut être à Tunis 3 ou 4 heures avant le départ
du bateau pour les formalités douanières. Comme y’a de l’autoroute
entre Kairouan et Tunis, la XR est calée a 110 km/h et j’attends
que le bornes passent.
A Tunis, on obtient les coups de tampons pour sortir: il faut bien faire
attention que les douaniers visent la sortie de la moto, sinon on risque
d’avoir des ennuis à la prochaine visite en Tunisie. On embarque
et le bateau par à l’heure.
On décompresse et on commence à se raconter ses souvenirs
pour tuer le temps...Combien de gamelles tu t’est pris...? 3,4,5 j’me rappelle
plus... Euh, la peur que je me suis fait quand j’ai passer c’te dune, j’pensais
que je me rétamais... Et quand Daniel à pourris les KTM-boys
sur la piste du pipeline avec son vieux tromblon... Eh David tu crois que
tu vas pouvoir la réparer cette Yam...? Ah ben Pierre, chapeau avec
ta Kawa 250... Gérard tu repars quand ? Sérieux ?
[Lundi 2; Tunis - Marseille]
Je remonte sur Genève avec Gérard. Maison, sucrée
Maison, mais déjà envie de repartir...
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